Les contes philosophiques de Jean Rigaud

La Roue de Fortune

Malgré quelques références qui situent l’action dans les années soixante, malgré l’ampleur et la précision de l’évocation de décors aussi variés que le Midi, Londres ou l’Irlande, le milieu où baignent les personnages déborde largement un cadre strictement social, localisé et daté. Le roman nous entraîne aux confins d’un certain fantastique qui ne revêt jamais la forme de l’invraisemblable ; plutôt celle d’un imaginaire qui frise la voyance au delà des apparences. Un mystère impalpable plane, trop fondamental pour être élucidé, inhérent à la condition même des choses dans l’univers.

Une affaire, obscure, de fausses Livres Sterling à échanger contre des vraies provoque, au fil des pages, dans une sarabande parfois comique, la mort d’un certain nombre de malfrats.
Mal à l’aise, décalé face aux autres, Horatio en « vacances » (dans tous les sens du terme) va de l’avant sans faillir, mais sans bien savoir vers où.
Les deux situations se croisent, déclenchant l’intervention de personnages énigmatiques, dont les liens avec le Cosmos (jamais formellement avérés) guident Horatio sans qu’il s’en rende clairement compte. Il ne manque pas de sensibilité à la pregnance des forces de la Nature qui l’environne, mais il est loin de saisir tout ce que peut masquer l’immédiate quotidienneté des faits.

Dans le vaste labyrinthe du Monde, quelle est l’autonomie de l’homme, à la fois conditionné par la grille de la civilisation (dont la fausse monnaie peut être vue comme l’emblème) et soumis à l’influence de forces mal déterminées ? Emporté dans le cycle du devenir, le héros (qui à la fin du livre n’est même plus tellement friand de la vraie monnaie qu’il a obtenue) réussira-t-il à se cerner lui-même, à prendre ses marques, à émerger davantage encore?

Postface du Professeur Michel LEROUX

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